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La Solo Guy Cotten Concarneau : un pan d’histoire de la Classe Figaro Beneteau

Mardi 12 mars 2024

Au pied de la ville close de Concarneau, 35 skippers, dont 15 bizuths, s’affrontent depuis lundi sur la première course de la saison du circuit Figaro :  La Solo Guy Cotten. Ce rendez-vous sportif, qui marque depuis 2017 l’ouverture du Championnat de France Elite de Course au large, célèbre cette année sa 48ème édition ! Une longévité d’exception dans la course au large, qui montre toute la richesse de cette régate, emblématique de la Classe Figaro à plus d’un titre.

 

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Il y en a eu des arrivées au petit matin, des skippers aux traits tirés, des batailles épiques jusque dans le chenal, des grosses frayeurs et des immenses joies à jouer dans ce merveilleux terrain de jeu qu’est la côte finistérienne, et ses innombrables courants et cailloux… Pour tous les marins passés par la case « Figaro », la « Solo Guy Cotten » est un incontournable de la saison, une de ces courses qu’on note chaque année dans l’agenda comme un réflexe pavlovien. Mais comment cette course s’est-elle imposée au calendrier Figaro au point d’en devenir constitutive ?
 
Tout commence en 1976, sous le joli nom des « 110 milles de Concarneau ». La Société des Régates de Concarneau (SRC), à l'initiative de Patrick Morvan, poussée notamment par le dynamisme de certains jeunes loups avides de compétition, lance cette nouvelle régate, immédiatement pensée comme « familiale et facile d’accès », souligne Marie-Astrid Parendeau, aujourd’hui attachée de presse de l’événement.

 

Half-tonners et convivialité

 

La course est alors ouverte aux croiseurs de tout crin, avec une part belle faite aux half-tonners, ce bateau construit comme un prototype à partir de 1967, dont la devise est entrée dans la légende de la voile : « Half a ton, twice the fun » !
 
Dès les premières éditions déjà, on retrouve sur la ligne de départ « les grands noms de la course au large française, comme Michel Desjoyaux ou Jean Le Cam », raconte Pierre Gautier, directeur actuel de la Solo Guy Cotten. La course, relativement courte mais toujours âprement disputée, devient une étape-clé dans la préparation des marins qui s’attaquent ensuite à la Course de l’Aurore, rebaptisée Solitaire du Figaro en 1980.
 
D’édition en édition, c’est toute une atmosphère qui se construit, à grand renforts de faits d’armes qui en nourrissent la légende. Dans ce petit port de pêche breton, on aime l’aspect « simple et accessible », rappelle Marie-Astrid. Le ponton où s’amarrent les concurrents est en face du restaurant où l’on vient partager un dernier « petit noir » avant le départ, et surtout célébrer les arrivées et refaire le match jusque tard dans la nuit… « La convivialité fait partie de Concarneau, et s’est donc tout naturellement imposée comme un ingrédient-clé de cette régate ».
 
Au fil des années, la Classe Figaro prend de l’ampleur, avec l’arrivée du half-tonner
Figaro Beneteau conçu par Finot en 1990. Avec lui arrive la notion de monotypie, le professionnalisme aussi. Mais ce nouveau public se fait vite aux usages concarnois, et “même si le niveau sportif s’est élevé d’année en année, l’ADN de cette course est resté inchangé, avec la volonté de rester peu onéreuse et ouverte à tous”, explique Pierre Gautier.

 

Parcours spécifique

 

Mais toujours plus populaire, la Classe Figaro, dont le Figaro Beneteau 2 est lancé en 2003 grâce au coup de crayon de l’architecte Marc Lombard, a des besoins de plus en plus importants pour ses compétiteurs. En 2009, le pas est franchi, en proposant pour la première fois « un parcours spécifique aux figaristes, différent des 110 milles », rappelle Pierre Gautier.
 
La « Solo Concarneau » naît alors, dans un format un peu rallongé pour permettre aux marins de partir deux nuits en mer. « Avec toujours l’idée qu’ils arrivent de jour, c’est un des principes de cette course, et c’est pour cela que le parcours est toujours délivré au dernier moment, en fonction de la météo », souligne-il.

 

En 2013, le soutien de Guy Cotten

 

Les skippers répondent présents, adhèrent à l’esprit autant qu’à l’épreuve. Devant ce succès, les bénévoles de la SRC vont demander le soutien d’une des plus belles entreprises de la région : l’équipementier Guy Cotten, dont le berceau historique est à Concarneau. En 2013, alors que le légendaire fondateur de la société bretonne vient de décéder, « le partenariat se fait tout naturellement, fort de cet attachement à cette belle Classe Figaro, où la dimension d’apprentissage est si importante », rappelle Julien Betholom, responsable des partenariats voile chez Guy Cotten.
 
La première édition est alors remportée par un certain Paul Meilhat, au nez et à la barbe de Nicolas Lunven et Armel Le Cléac’h, après une vingtaine d’heures de lutte implacable pour tirer profit de chaque bascule de vent. « Un super souvenir de régate et de stratégie à couteaux tirés, cramponnés à la barre », se souvient celui qui est désormais passé dans la classe IMOCA et s’apprête à disputer son deuxième Vendée Globe en novembre, mais garde toujours en mémoire ces régates en Figaro « où le niveau était dingue, et tellement formateur ».
 
Cette arrivée « est un souvenir incroyable pour Guy Cotten, car Paul était un skipper qu’on soutenait aussi à l’époque, donc ça faisait vraiment coup double », se rappelle avec bonheur Julien Bertholom, dont l’entreprise s’apprête cette année à célébrer ses 60 ans, plus assurée que jamais de ce partenariat « pleinement ancré dans notre identité. C’est le marin qui fait la différence plus que le bateau, et chez Guy Cotten on aime tout particulièrement les belles histoires humaines. »

 

Arrivée à l’aube, pluie d’étoiles filantes ou lune rouge

 

Résolument attachée à son côté « sans pression », la Solo Guy Cotten n’en est pas moins « hyper adaptable, et évolue en fonction des besoins des skippers et de la Classe Figaro », rappelle Marie-Astrid. Historiquement solitaire, elle s’ouvre au double lors des années de transatlantique, ou se déplace dans le calendrier en fonction des impératifs. « Il y a deux ans, nous avons aussi fait évoluer le format de course en proposant deux journées de parcours côtiers supplémentaires, avant la grande course. Les coureurs en étaient demandeurs, nous avons travaillé avec la Société des Régates de Concarneau, la ville de Concarneau et la Classe Figaro Beneteau pour répondre au mieux à leurs attentes », rappelle ainsi l’organisateur, qui se réjouit d’avoir « les bateaux plus longtemps à quai, ce qui crée aussi plus d’animation ».
 
Une facilité logistique, due à son armée de bénévoles, qui assure la pérennité de l’épreuve, et promet aux skippers de la Classe Figaro des éditions toujours mémorables. Les noms des vainqueurs gravés sur la coupe continuent d’ailleurs de faire rêver et d’incarner toute la vitalité de cette Classe Figaro : Yann Eliès, Charlie Dalin, Corentin Horeau, Anthony Marchand… « Je garde un souvenir particulièrement fort de l’édition 2019, avec une arrivée à l’aube dans des lumières magnifiques d’Armel Le Cléac’h, quatre minutes seulement devant Martin Le Pape après 270 milles de course, c’était incroyable », se rappelle Marie-Astrid.
 
Des anecdotes de régate qui peuplent aussi les mémoires des coureurs, à l’image de Pierre Quiroga, qui y remporte en 2020 sa première victoire de course en Figaro Beneteau. « Je l’ai longtemps attendue et ça a débloqué beaucoup de choses pour moi en termes de confiance », dit celui qui, l’année suivante, remporte la Solitaire du Figaro, et garde encore en tête de cette Solo Guy Cotten « une pluie d’étoiles filantes la première nuit, une lune rouge exceptionnelle la seconde, puis des orages ! » Un plaisir pur d’être en mer qu’on souhaite également aux marins de la 48e édition, et de toutes celles qui suivront…